Ghetto à Paris.
Ce matin-là, je sortais du cabinet d’un de mes conseillers juridique, le cœur léger car je sentais que maître Addad était sur le point de régler pour moi une affaire compliquée.
Je venais juste de quitter son immeuble et me dirigeais vers le boulevard dont j’entendais tout près les bruits assourdis. Au bout de quelques pas, je me trouvais face à une grille fermée et maugréais.
—Le code, c’est quoi ? Ah oui, je m’en souviens, 824A. Mais où se trouve le clavier ?
Impossible de sortir, j’étais enfermé dans cette grande cour entourée d’immeubles chics dans ce non moins chic 16°arrondissement comme une souris de laboratoire derrière les parois de sa cage. Mais moi, contrairement à la souris qui n’a rien connu d’autre que son univers de plastic hérissé de barres verticales, moi, je mène ma vie en liberté. Je traverse des rues à mon aise, je descends des escaliers, je m’assois sur une banquette de métro, bref je suis libre, libre je vous dis !
—Mais où ont-ils planqué ce putain de bouton ?
Personne dans la cour, je consulte ma montre, treize heures.
—Ils sont tous devant leur téléviseur et s’apprêtent goulument à recevoir leur lot de mauvaises nouvelles !
C’est alors qu’une femme s’approche, perchée sur dix centimètres de talons aiguilles. Elle vient de sortir d’un immeuble et je comprends qu’elle aussi souhaite rejoindre la rue.
Arrivée à trois mètres de la grille, elle tend une main alourdie de bagues dorées vers un arbuste où je devine que doit se trouver le bouton libérateur. Je m’empresse de la suivre et murmure humblement à son intention.
—Je ne trouvais pas le bouton de sortie.
C’est alors qu’elle lève la tête sans me regarder, et sans rien me dire franchit la grille.
En un quart de seconde, j’ai compris que, honte à moi ! Je ne faisais pas partie du ghetto…